CULTURE :: PORTRAITS DE CAPVERDIEN(NE)S |
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Roberto Duarte da Silva
[ Sciences ]
- [ Publié le 24/03/2007 ]
Roberto Duarte Silva est né le 25 février 1837 à Ribeira Grande, sur l'île de Santo Antão, au nord de l'archipel du Cap-Vert.
A la mort de son père, le pharmacien de la ville le prend sous sa protection et l'envoie suivre des études de médecine à Lisbonne.
Diplômé à 20 ans, il ouvre une pharmacie à Macau (enclave portugaise en Chine) puis à Hong-Kong où les français qu'il rencontre en tant que fournisseur officiel pendant la guerre de Chine l'incitent à s'installer à Paris, chose qu'il fera en 1862.
Il y suit des études auprès de grands noms comme Henry Saint-Claire Deville, Antoine-Jérôme Balard (inventeur du brôme), et surtout de Charles Wurtz (auteur du "Dictionnaire de chimie pure et appliquée"), qui l'intègre dans son équipe de recherche. C'est d'ailleurs dans le laboratoire de Wurtz (photo) qu'une expérience mal contrôlée provoque une explosion et lui fait perdre son oeil gauche.
Il entre par la suite à l'Ecole des Mines, puis à l'Ecole Centrale des Arts et Manufactures, récemment créée, où il dirige les travaux de chimie analytique, puis à l'Ecole Municipale de Chimie où il côtoie Pierre Curie. En 1885, ses recherches en chimie organique lui valent le Prix Jecker de l'Académie des Sciences de Paris; deux ans plus tard, ses pairs le placent à la tête de la Société Chimique française.
Parmi les nombreuses études qu'il mena (pinacone et pinacoline, ammoniaques composées à base de amyle, propylamine, etc), on retiendra surtout qu'il réussit, en collaboration avec Charles Friedel, la synthèse totale de la glycérine.
En 1878, il est nommé Chevalier de la Légion d'Honneur.
Le capverdien demanda la nationalité française, et légua ses biens et sa bibliothèque à la Société Chimique.
Il est mort à son domicile parisien (rue de la Harpe, dans le quartier latin) le 8 février 1889, et repose au cimetière Montparnasse.
En 2007, la Banque du Cap-Vert édite un nouveau billet de 500 escudos (moins de 5 euros) à l'effigie de l'un des très rares scientifiques capverdiens.
La maison où il est né à Ribeira Grande (Santo Antão) existe toujours, elle est située face à l'hôtel 5 de Julho et héberge aujourd'hui la petite épicerie "Cipriano Cruz".
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Capitao Ambrosio
[ Histoire ]
- [ Publié le 22/03/2007 ]
Le 4 juin 1934, São Vicente fut secouée par la première véritable révolte populaire de sa, il est vrai, courte histoire.
Depuis des années, l'île connaissait une crise majeure, le trafic de bateaux dans le port de Porto Grande n'ayant plus rien à voir avec celui du début du siècle. Grâce aux dépôts de charbon installés et gérés par des compagnies anglaises, le port avait connu ses heures de gloire en accueillant des milliers de bateaux venant se ravitailler.
Mais avec la hausse des taxes sur le charbon, avec la meilleure autonomie des bateaux, avec la rude concurrence des ports de Dakar, des Açores et des Canaries, avec l'amélioration des conditions de navigation par le canal de Suez, le port de Mindelo subissait un déclin que rien ne semblait pouvoir enrayer.
Ambrosio, ou Nhô Ambrôze, ou "Capitão Ambrosio" était un simple menuisier vivant à de Ribeira Bote. C'est dans ce quartier populaire (il l'est toujours) qu'un groupe de personnes s'est réuni en cette journée du 4 juin: décision est prise de descendre en ville pour demander des comptes aux autorités.
Ambrosio en tête, le petit cortège se dirige vers d'abord vers la mairie, ensuite vers le télégraphe (devenu par la suite lycée du centre-ville).
Ni les autorités municipales ni le pouvoir colonial joint par télégramme ne veulent répondre aux manifestants, vite rejoints par de nombreux badauds. Accompagné d'un homme brandissant le drapeau noir (symbolisant la faim - on dit que le mot "crise" était peint sur le drapeau), Ambrosio donne alors l'ordre au peuple affamé d'aller se servir là où il y a à prendre: les dépôts de la douane (actuel Centre Culturel de Mindelo et Clube Nautico), et ceux des grandes maisons commerciales (Miranda, Nho Bronc, Feijoo). Gouache de Manuel Figueira - 1974
Pendant le pillage des stocks, Anton Grigola, un jeune garçon, est tué par la baïonnette d'un soldat : sans l'intervention du médecin militaire Regala calmant la foule et les troupes descendues d'El Fortim (la forteresse dominant la ville), Mindelo aurait pu connaître un véritable bain de sang (la ville a rendu hommage à ce colonel en lui dédiant une place, place à partir de laquelle commence d'ailleurs l'avenue Ambrosio qui emmène vers Ribeira Bote).
 Photos du 4 juin 1934 - Pillage des entrepôts
Finalement, au coucher du soleil, la population rentre dans les quartiers en emportant avec elle tout ce qu'elle a pu trouver dans les dépôts: farine, patates, saindoux, haricots, sucres, épices. L'histoire veut que le leader de l'insurrection rentre chez lui les poches et les mains vides: ses voisins lui offrent alors du poivre, qu'il revendra aussitôt pour s'acheter un peu de viande.
Mais quelques jours plus tard, le gouverneur de la province fera arrêter les leaders de ces émeutes de la faim, et Ambrosio sera envoyé en Angola. Rentré à une date inconnue, il mourra à Mindelo en 1946, son nom restant à jamais associé à la "révolution d'Ambrosio", l'une des rares émeutes de la faim de l'histoire du Cap-Vert, qui a pourtant connu d'innombrables famines.
Ce n'est que bien des années plus tard que le juge et poète Gabriel Mariano lui dédiera un poème en lui donnant le nom de "Capitão Ambrosio". Poème mis en musique après la Révolution des Oeillets par le chanteur portugais Julio Pereira. Un autre poème sera consacré à Ambrosio par Corsino Fortes en 1986, dans son recueil Arvore et Tambour.
En 1963, alors que la lutte pour l'indépendance du Cap-Vert ne fait que commencer, le PAIGC édite un disque reprenant une série de poésies capverdiennes, dont celle de Mariano.
Plus tard, le peintre Manuel Figueira couchera sur papier et sur la toile l'acte héroïque du petit menuisier, en reprenant la symbolique du drapeau noir. Membre et fondateur de la coopérative Resistência créée juste après l'indépendance, il s'attachera à valoriser les arts traditionnels capverdiens et fera par exemple un travail de recherche sur le tissage: entre autres réalisations, une tapisserie rendra hommage au capitaine Ambrosio.
Mise à jour février 2009: en 2009, la ville de Mindelo devrait ériger un monument à l'honneur du fameux capitão.
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Aurélien Duarte
[ Sports ]
- [ Publié le 19/03/2007 ]
Oncle du rappeur Stomy Bugsy et cousin de la chanteuse Mariana Ramos, Aurélien Duarte est né le 20 octobre 1970 et a grandi dans la banlieue sud de Paris. Avec 116 combats dont il est sorti gagnant à 100 reprises, il est aujourd'hui l'un des plus "vieux" champions en kick boxing et en Muay Thaï (boxe thaï). Son palmarès est édifiant, il accumule les titres nationaux et mondiaux: il est champion du monde en titre de kick boxing le 9 juin 2006.
C'est chez lui à Châtillon, où il enseigne deux fois par semaine sur le ring du Châtillon Boxing Club, qu'on lui a passé la ceinture mondiale après qu'il ait envoyé le portugais Tieri Mendès au tapis dès la quatrième reprise. Un titre qui succède à deux autres récompenses gagnées en 1997 et 1999, sans oublier de mentionner deux autres titres mondiaux gagnés en Thaï Boxing et un autre en Karaté Shidokan, excusez du peu!..
 Avec Mariana Ramos, février 2007 - merci à Dan
Les deux disciplines dans lesquelles il excelle ne sont pas si éloignées le Kick Boxing a eu son heure de gloire en Occident avant que le Muay Thaï - dont il était inspiré - soit importé et développé en Europe et aux Etats-Unis. En gros, la boxe thaï est plus complète que le Kick Boxing dans la mesure où elle autorise une plus grande variété de coups (coudes, genoux): mais les deux disciplines exigent un entrainement soutenu ainsi qu'une rigueur indispensable à l'assimilation des techniques.
Même si vous n'êtes pas fan des sports de combat, vous avez quand même peut-être déjà eu l'occasion d'apercevoir la carrure d'Aurélien Duarte dans la presse magazine ou à la télévision (en particulier dans la série "les Colocataires"); c'est tout naturellement que le champion songe à une deuxième carrière dans d'autres salles obscures ou sur le petit écran.
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Horace Silver
[ Musique ]
- [ Publié le 14/03/2007 ]
Né le 2 septembre 1928 à Norwalk dans le Connecticut, décédé le 18 juin 2014. Bien que son père capverdien écoute de la musique traditionnelle venant de l'archipel, il s'intéresse assez tôt au jazz, au blues et au gospel, qu'il interprète d'abord au saxophone puis au piano, instrument qu'il adopte définitivement. En 1950, il travaille un court moment sous les ordres de Stan Getz pour lequel il composera même quelques morceaux.
Au début des années 50, il multiplie les collaborations new-yorkaises avec de grands noms, en particulier avec Miles Davis, Lester Young, Oscar Pettiford, Coleman Hawkins ou encore Lou Donaldson, avec lequel il enregistre son premier disque en tant que leader, en 1952. L'année suivante, il s'associe au batteur Art Blakey pour créer le groupe Jazz Messengers et jeter les bases d'un nouveau style, le hard bop, en composant plusieurs standards comme "The Preacher" et "Doodlin'", qui connaîtront un énorme succès.
Mais en 1956, le pianiste d'origine capverdienne quitte les Messengers pour créer son propre quintet, à la tête duquel il va enregistrer de très nombreux disques dont quelques-uns tout bonnement inoubliables. Le style imaginatif et envolé dont Silver fait preuve au piano a influencé un grand nombre d'interprètes et son hard bop devient provisoirement la locomotive du fameux studio Blue Note chez qui il enregistrera pendant près de trois décennies.
Outre les titres déjà cités, on ne peut passer sous silence son impeccable "Capeverdean blues" (souvent repris dans l'archipel par les meilleurs interprètes) et le somptueux "Song for my father" (repris par Dee Dee Bridgewater) composés dans les années 60, qui montrent qu'il n'oublie pas ses origines.
Après avoir créé son propre studio sans grand succès, après une relative traversée du désert, il rejoint successivement Columbia et Impulse! dans les années 90 qui lui permettent de revenir sur le devant de la scène jazz et de renouer, désormais septuagénaire, avec un succès bien mérité.
Discographie (non exhaustive):
1951: Stan Getz: Complete roost recordings (collaboration) 1952: Lou Donaldson: Quartet/quintet/sextet (collaboration) 1952: Coleman Hawkins: Disorder at the border (collaboration) 1953: Lester Young: Masters of Jazz #7 (collaboration) 1954: Miles Davis: volume 1 (collaboration) 1954: Miles Davis: blue haze (collaboration) 1954: A night at Birdland (avec Art Blakey) 1955: At the café Bohemia (Jazz Messengers) 1956: Six Pieces of Silver 1957: Stylings of Silver 1958: Further Explorations 1958: Senor Blues (avec Bill Henderson) 1959: Blowin' the blues away 1959: Finger Poppin' 1960: Horace-Scope 1961: Doin the thing 1962: The Tokio Blues 1963: Silver's Serenade 1964: Song for my father 1965: The Cape Verdean Blues 1966: The Jody Grind 1968: Serenade to a soul sister 1969: You Gotta Take a Little Love 1970: In Pursuit of the 27th Man 1970: That healin' feelin' 1971: Total Response 1972: All 1975: Silver'n Brass 1976: Silver'n Wood 1976: Silver'n Voices 1977: Silver'n Percussion 1979: Silver'n Strings 1981: Guides to growing up 1983: Spiritualizing the senses 1983: There's no need to struggle 1985: Continuity of Spirit 1988: Music to ease your disease 1991: Rockin' with Rachmaninoff 1993: It's go to be funky 1994: Pencil packin' papa 1996: The hardbop grandpop 1997: A prescription for the blues 1998: Jazz has a sense of humour
DVD: 1976: Live at the Umbria Jazz Festival
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Antonio Pedro da Cruz
[ Sports ]
- [ Publié le 14/03/2007 ]
Antonio Pedro da Cruz, dit "Topad" au Cap-Vert et "Tonio" à Antibes où il vit, est le seul skipper professionnel venant d'un pays d'Afrique.
Né à Mindelo le 7 août 1966, il est rapidement plus attiré par la mer que par les bancs de l'école; au contact des européens venus profiter du mouillage paisible dans la baie du Porto Grande, il apprend la géographie et les langues étrangères.
A 14 ans, il décide d'embarquer sur le voilier de français qui l'emmènent jusqu'aux Antilles. La traversée est rude, Topad n'en voit pas le bout, et quand le voilier croise enfin les premiers bateaux de pêcheurs caraibéens, le jeune croit à une mauvaise blague et manque de piquer une crise de nerfs: "après tant de jours de galère, les pêcheurs qu'on voyait de loin étaient noirs, j'ai cru qu'on était revenus en Afrique!".
Mais il a bel et bien effectué sa première traversée de l'Atlantique et, dans ces îles françaises, il apprend plusieurs petits métiers, jamais bien loin des voiliers. Quelque temps plus tard, il rejoint la France et sa famille d'adoption, qui lui permet de se consacrer à sa passion: son destin est tracé.
Simple marin, embraqueur, moulineur, second, c'est en toute logique qu'il devient finalement capitaine et skipper. Dans les années 90, sa bonne étoile le place sur le chemin de Frank Ténot (créateur de Salut Les Copains dans les années 60, il est l'un des fondateurs de l'empire Hachette-Filipacchi) qui, sous le charme, le sponsorise et lui permet de participer à ses premières mini-transat à la barre du Jazz Magazine.
Topad revient régulièrement à Mindelo où sa silhouette athlétique et ses dread-locks ne passent pas inaperçus: tout le monde le connait, tout le monde le salue, il a le sourire franc et il n'oublie personne, ni dans le centre-ville ni dans son quartier de Bela Vista.
Mais même quand il recharge les batteries sur son île de São Vicente, il n'oublie pas vraiment les compétitions. Même s'il n'arrive pas à se hisser en tête des classements (à noter cependant sa 12ème place à l'issue du trophée BPE 2005 à bord du Little Black Shark), il s'entête et, toujours animé par la même passion, il finit par participer aux courses les plus glorieuses: Transat AG2R, Solo Méditerrannée, Solitaire Le Figaro.
Aujourd'hui, après 31 traversées de l'Atlantique, c'est aux commandes du Baïko qu'il part à la course aux récompenses, sans jamais abandonner les couleurs de son pays.
En 2007, son actualité est chargée, et les objectifs sont de taille:
- Trophée BPE en solitaire: de Belle-Ile-en-Mer à Marie Galante, départ le 25 mars 2007; - Cap Istanbul en double, du 19 mai au 17 juin; - La solitaire Afflelou Le Figaro: départ de Caen le 31 juillet 2007.
On lui souhaite bon courage sur la route du succès.
Le 24 septembre 2008, Topad signe sa première victoire dans le circuit Solitaire Figaro en remportant la deuxième étape Sardaigne-Sicile de la Cap Istanbul.
Le 13 avril 2009, Topad est élevé au rang de Citoyen d'Honneur par la ville de Mindelo, qui fête ses 130 années d'existence et qui récompense aussi Cesaria Evora.
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